Accueil BIEN commun Patrick de Brou de Laurière : aider par-delà sa propre finitude

Patrick de Brou de Laurière : aider par-delà sa propre finitude

Gilbert Soulier et Jacques Larcher, neveu du fondateur © SBT
MÉMOIRE. Pour le treizième anniversaire de sa création, qui correspond à la disparition en 2010 du mécène dont il porte le nom, le Fonds de dotation Patrick de Brou de Laurière fait le point sur ses activités : aide à la recherche médicale et aux malades, et art-thérapie. Et ouvre les portes de son hôtel particulier ce samedi 24 juin.

C’était un mécène et un artiste — pianiste, élève du Conservatoire de Paris et de Nadia Boulanger, il a aussi écrit une cinquantaine de chansons — à la fois discret et atypique, fantasque, hors de notre époque. Descendant d’Henri Bertin (ministre de Louis XV), héritier par jeu de domino familial du plus gros portefeuille d’actions Michelin (premier actionnaire privé), Patrick de Brou de Laurière vivait entre Paris, Tanger (2 ha au cœur de la ville, vendus au roi lors de la succession) et Périgueux (son domicile fiscal), où son magnifique hôtel particulier*, devenu siège de la structure qui lui survit, entrouvre parfois ses portes pour accueillir des manifestations de bienfaisance, environ six fois par an…  comme ce samedi 24 juin (lire plus bas) pour cet anniversaire qui vient remplacer les dix ans empêchés par la période Covid.

Fonds de dotation plutôt que Fondation

Lors de la visite du club de la presse du Périgord © SBT

« Nous nous sommes orientés vers un Fonds de dotation car c’était, en 2009, une possibilité toute récente et ce dispositif était plus rapide à mettre en œuvre qu’une Fondation. » Mais Patrick de Brou de Laurière s’est éteint au moment de sa mise en œuvre, au printemps 2010. Jacques Larcher, son exécuteur testamentaire, préside cette œuvre philanthropique depuis le début, en attendant qu’un autre bénévole prenne la relève. Cet ancien directeur général de l’Office de coordination bancaire et financière est assisté au poste de trésorier par Gilbert Soulier, ex président du cabinet d’expertise-comptable et commissariat aux comptes de La Brégère, à Boulazac.

Une assemblée de bénévoles s’investit autour d’eux pour le Fonds, certains siègent au sein d’un comité stratégique et sont d’autant plus expérimentés dans les affaires « qu’il est difficile de gérer un argent qui ne vous appartient pas ». L’administration exerce un contrôle sur le rapport annuel déposé et sur l’emploi des quatre salariés à temps partiel (la secrétaire générale, qui gère les demandes et les aides, un comptable pour le suivi financier, et deux personnes pour l’entretien des locaux).

Un patrimoine pensé pour prospérer

Le socle de ce fonds, c’est un patrimoine de 20 millions d’euros (une somme équivalente de cette succession ayant été transmise à des tiers, selon la volonté du défunt). « Au sens moral, ce sont des fonds publics que nous gérons, souligne Gilbert Soulier. La fiscalité est favorable avec une exonération des droits de succession pour un legs et nous sommes exemptés de tous les impôts, y compris sur les revenus de placement. » Le contenu de la dotation ne peut pas être consommé et produira donc des dividendes chaque année, à l’infini, un seul don produisant plusieurs fois des intérêts.

« Nous ne distribuons que la moitié des bénéfices. » Avec 6 millions d’euros de réserve, le Fonds a cependant accusé deux secousses importantes lors de la chute des marchés financiers, après le Covid.

© SBT

3 millions d’euros ont été attribués en 13 ans en direction de 80 sujets d’étude, de la perte de mémoire à la stimulation cérébrale profonde pour les malades de Parkinson, en passant par le cancer du rein, la maladie de Charcot et autres maux neuro-évolutifs. Atteint d’un cancer du pancréas, Patrick de Brou de Laurière avait voulu orienter une action caritative vers cette maladie, qui reste l’un des axes de recherche parmi les nombreux thèmes auxquels le Fonds apporte une aide.

Comité scientifique

Le Fonds est le seul en Dordogne à attribuer des sommes aussi importantes à la recherche et il compte parmi les dix premiers en Nouvelle-Aquitaine. Il est donc très sollicité. Les dossiers affluent de toute la France et le Fonds s’appuie, via un médecin qui siège à son CA, sur l’avis d’un comité scientifique présidé par la professeure Hélène Amiéva, avec un suivi des travaux financés et la lecture des études publiées.

Aucun projet ne reçoit plus de 50 000 euros, exception faite de la création d’une unité de recherche clinique à l’hôpital de Périgueux directement due au Fonds, avec un financement de l’installation à hauteur de 120 000 euros : cette unité présente un intérêt qui permet d’attirer des internes de Bordeaux.

Recherche médicale et art-thérapie

« Nos statuts autorisent toutes les aides, on peut aussi financer des achats de soins ou de matériels. » 60 % des sommes vont à la recherche médicale — fondamentale et clinique —, 10 % à l’aide directe aux malades, et 30 % à l’art-thérapie (musique, atelier peinture) via des associations qui œuvrent en milieu hospitalier, par exemple à Francheville. Cette pratique était chère au cœur du donateur : déjà utilisée dans les années 1940, elle a été redécouverte dans les années 1980 pour le bien-être qu’elle procure aux malades comme pour les aidants. Ainsi se rejoignent les deux préoccupations de Patrick de Brou de Laurière.

Le maître des lieux était aussi collectionneur de véhicules anciens : si une voiture exceptionnelle a dû être vendue lors de la succession, il reste trois véhicules de choix dans le garage.© SBT

 

© SBT

* Construit de 1903 à 1911 à l’initiative de son grand-père, surnommé le médecin des pauvres, l’hôtel de Laurière s’élève sur des plans de l’architecte bordelais Albert Touzin, en retrait de l’actuelle place Yves-Guéna. Cette demeure de style néoclassique entourée d’un parc aux arbres centenaires a retrouvé son lustre d’antan après trois ans de travaux de rénovation et on peut y admirer de remarquables collections.

Tout un programme

Ce samedi 24 juin après-midi, sur inscription (à tenter tout de même sans !) l’hôtel s’ouvrira spécialement à la visite commentée (à 15h et 16h) et pour un récital en plein air dans le parc avec des mélodies françaises interprétées par Hermine Huguenel, mezzo soprano, avec Marie-Frédérique Couzinet au piano.

Le mobilier de la chambre a été restauré par Philippe Glemet, maître artisan ébéniste à Périgueux © SBT

Une messe chantée est prévue à 18h30 en la cathédrale Saint-Front, en mémoire de Patrick de Brou de Laurière.

À partir de 20h, les représentants et bénévoles des associations locales d’aides à la personne sont conviées à une soirée privée conviviale et musicale.

L’une des pièces de collection dans la salle de jeux © SBT