“Solutions pour une ruralité heureuse” : c’est le titre d’une des nombreuses conférences proposées le troisième jour, dimanche 13 juillet, au Festival international du journalisme à Couthures-sur-Garonne, en Lot-et-Garonne. Un Festival lancé en 2016 qui réunit tous les ans de grands noms de l’information et un public toujours plus nombreux.
Les 11, 12, 13 juillet n’ont pas fait exception à la règle. C’est en présence d’une foule de journalistes, communicants et d’un public intéressé par les grands enjeux de notre société que s’est tenu ce festival rural.
International et rural
Rural, ce festival international l’est pour être organisé dans un petit village du Lot-et-Garonne, avec une vraie plage sur la Garonne où les festivaliers peuvent se rafraîchir. Un marché de producteurs locaux leur permet de se restaurer sur de grandes tables de bois et des bottes de paille. Des dégustations bienvenues entre deux conférences qui présentent ce qui se fait de mieux dans le coin. Un festival qui fait aussi la part belle aux problématiques de la ruralité.
Exemple (parmi d’autres) des thèmes abordés, la question de la relation entre connivence et défiance entre les médias locaux et les élus, y était posée cette année.
D’autres formes de journalisme émergents y sont aussi présentées par leurs auteurs. L’innovation, sous toutes ses formes, et les initiatives citoyennes y sont valorisées. C’est ainsi que des Périgourdins sont venus parler d’un café associatif qui a vu le jour à Saint-Rémy-sur-Lidoire (initiative déjà évoquée par BIEN en Périgord).

Ils étaient accompagnés d’un autre Périgourdin, l’illustrateur de BD Troubs (Jean-Marc Troubet de son vrai nom) qui vit à Siorac-de-Ribérac. Accompagné de David Prudhomme, dessinateur de Châteauroux, ils ont conçu une fresque de la ruralité pendant que se tenaient les conférences sur cette thématique.
Une consultation citoyenne
Valérie Moreau, une des chevilles ouvrières de ce café, était en effet invitée à parler du tiers-lieu café associatif de Saint-Rémy-sur-Lidoire. Avec d’autres habitants, elle a contribué à son émergence. Mais elle a tenu à rendre à César… « Le café associatif était un projet de la campagne électorale de notre maire Éric Frétillère, mais rien n’aurait été possible sans la volonté d’un collectif d’habitants et d’élus. Ce sont eux qui commandent », assure-t-elle en préambule.
Dans ce village de 500 âmes, privé de commerces de proximité, la phase de consultation des habitants a été prise très au sérieux. Certes, la municipalité avait la volonté de mettre un bâtiment à la disposition de volontaires pour y créer un projet, mais « il ne s’agissait pas de créer un lieu de culture pour qu’il vivote. Il fallait qu’il réponde à une demande, à un besoin », a prévenu Valérie Moreau.
De la consultation citoyenne ont émergé plusieurs envies, notamment un accès de proximité à la culture (une médiathèque associative est née aussi de cette concertation…), mais aussi la possibilité d’avoir un lieu de convivialité où se retrouver, échanger, travailler, bref sortir de l’isolement. La pluralité des attentes aurait pu faire capoter le projet, mais elle est devenue une force.
Un lieu évolutif

Ce sont donc plusieurs initiatives qui ont été menées de front dans cette petite commune, toutes destinées à répondre aux besoins de ses habitants. Un tiers-lieu, également café associatif, a ouvert ses portes il y a un an pour y proposer un espace dédié au coworking, mais aussi un lieu de spectacles et d’animations culturelles. « Pour créer le café, nous avons bénéficié du soutien du dispositif 1000 cafés, très utile pour mieux appréhender les aspects règlementaires. »
Ce sont donc les habitants du village, mais aussi de ses environs, qui ont pris en main le projet de maintenir des projets culturels toute l’année dans ce coin plutôt éloigné des villes. Un pari gagnant puisque 250 personnes ont adhéré au café associatif qui évolue en permanence pour associer encore plus les producteurs locaux, déjà présents lors des animations sous forme de food truck. Un boulanger voisin va aussi être associé au projet. L’idée court de restaurer un marché régulier dans le village. L’offre devrait s’enrichir d’ateliers nutrition, d’autres seront dédiés aux aidants, en partenariat avec l’ARS. Un atelier de réparations devrait aussi voir le jour.
Inclusion et partage
Début septembre, l’association de Saint-Rémy-sur-Lidoire organisera les premiers jeux inter-villages qui vont réunir pas moins de quatre communes.
Enfin, pour que le lieu associatif soit ouvert à tous, un covoiturage a été prévu pour faire venir les résidents des Ehpad et ceux d’un hôpital psychiatrique voisin afin qu’ils puissent assister aux divers spectacles proposés dans le café associatif.
L’exemple du dynamisme de Saint-Rémy-sur-Lidoire, ouvrant sur un projet d’inclusion en milieu rural, a été particulièrement apprécié parmi les projets présentés lors de la conférence justement nommés “Quand la greffe prend”.
Un festival ouvert sur le monde

Depuis 2016, le Festival international de journalisme n’en finit pas de surprendre par son ingéniosité à mêler l’actualité locale, nationale et internationale, et la convivialité autour de stands dédiés à la gastronomie lot-et-garonnaise, ses ateliers d’écriture, ses speed dating, dédicaces, rencontres… Le tout dans un écrin de verdure où un paisible village est mis au cœur des débats. Cette année, aux grandes médias français et étrangers, toujours aussi bien représentés, se sont joints des journalistes venus de Russie, d’Afghanistan, de Syrie, d’Haïti. Chassés par les conflits et les régimes de leurs pays, ils continuent d’exercer leur métier depuis leurs lieux d’exil. Ils ont témoigné, notamment dans les conférences sur les grandes thématiques internationales.
Sept thématiques étaient en débat cette année : pourquoi le journalisme d’opinion fait recette. Trump en croisade contre le liberté d’informer. L’ordre mondial chamboulé par l’ouragan Trump. Les lobbies manipulent-ils l’information ? Faut-il changer de République ? La ruralité, chance ou malédiction ? Sauver l’océan (en présence de Paul Watson, qui a fondé une société de conservation des cétacés et participe à des actions de protection des océans qui l’ont rendu mondialement célèbre, et lui ont valu d’être incarcéré 5 mois au Groenland).
À la fin de chaque festival, les organisateurs réunissent les participants pour une concertation participative afin de prévoir l’organisation et la programmation du prochain festival.