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Capter l’attention, ça se mérite

© diateino
COMMUNICATION. Il n'est pas question ici de faire son intéressant, ce qui aurait plutôt tendance à lasser : ce livre entend agir en profondeur pour aider à délivrer son message dans les meilleures conditions. Un kit de survie pour émerger du brouhaha ou percer le silence.

Comment devenir intéressant ? Certains le sont plus que d’autres, parce qu’ils ont vécu des choses passionnantes… ou savent transformer leur carburant ordinaire en super. Bien des beaux parleurs maîtrisent la forme avant le fond. Ce livre s’adresse à ceux qui ne prennent pas assez la parole alors qu’ils ont beaucoup à dire.

Nous avons tous un jour quelque chose à raconter…

Pour rompre avec les moments de panique, de doute, de solitude, l’auteur partage ses astuces de l’art oratoire pour permettre de s’adapter à chaque situation, de la tablée amicale au rendez-vous professionnel, pas de temps mort, il a toujours un élément de langage pour parer aux imprévus et donner quelques occasions d’exister si ce n’est de briller. Pas d’arme fatale ou de baguette magique pour capter l’attention : il convient de s’entraîner un peu. Mister Bean ne se transformera pas illico en sniper de la réplique, tel n’est pas le but d’ailleurs. Mais si ce livre aide à prendre tout simplement le contrôle du quotidien, ce n’est déjà pas si mal. L’art de persuader, c’est d’abord l’art de se persuader qu’on peut le faire.

Sans devenir le centre du monde, chacun peut apprendre à mieux raconter ce qu’il a à cœur de transmettre, du dernier film vu au métier hyper-technique de son conjoint. Et un sujet a priori rasoir peut devenir palpitant si on s’engage vraiment dans sa présentation. Toute occasion est bonne pour s’entraîner (grâce au carnet d’exercices et aux QR code du livre) avec un message à exprimer, une histoire à construire, des pensées à organiser. Et Dark-Vador en renfort, des accroches en forme de métaphore, analogie, devinette…, jusqu’à “l’étoile de la mort”.

Storytelling et figures de style

Deux préfaces montrent que l’énergie qu’on dégage ne passe pas forcément par la parole et qu’il n’y pas de don mais surtout des compétences. Voilà pour la marge de progression. En appliquant à son écriture l’art de “faire monter l’attention”, Franck Marcheix passe en revue tout ce qui nous entrave pour mieux appliquer ses stratégies et ses techniques. Un défi à explorer les points d’accroche entre soi et les autres. Magie oratoire de Gorgias, autoévaluation et estime de soi, souvenirs de réunions soporifiques, menace du verbal fallacieux et du tribun populiste, ce voyage en rhétorique n’oublie pas de mettre les rieurs de son côté. Il donne les clés pour reconnaître les structures de récits et les utiliser (on se balade dans Star Wars, Le Seigneur des anneaux et Harry Potter).

Les histoires, les souvenirs, les expériences que partage l’auteur valent tous les conseils et sont autant de munitions pour s’affirmer, aborder une prise de parole en conférence ou une cérémonie publique. Un focus est mis sur la première impression, qui doit forcément être la bonne, et sur les vilains parasites, gestes ou tics verbaux (le fameux “du coup“ sorti on ne sait d’où qui fait “saigner les oreilles”). Des techniques accessibles permettent de dépasser ses peurs pour s’arrimer à sa pensée et son argumentation (l’armature d’une œuvre doit rester invisible), et concevoir des temps forts professionnels à la manière d’un standup dont on se souviendra, n’en déplaise aux fans de PowerPoint (s’il en reste). La surprise étant le meilleur allié de l’éloquence, les conteurs nous l’enseignent depuis la nuit des temps. L’auteur invite à rejoindre cette communauté de “dealers d’histoires©” capables d’envoyer un shoot cérébral en quelques mots. Dealers-Leaders… mais c’est bien sûr !

Hors de contrôle

On ne peut qu’avoir une pensée émue pour les enseignants, susciter l’intérêt étant pour eux une bataille à livrer à chaque cours devant des élèves qui n’apprennent pas, eux non plus, l’art de raconter des histoires… Franck Marcheix, qui a suivi un cursus en sciences de l’éducation et en a même tiré une conclusion salutaire en termes d’influence, est hypnothérapeute et “hypnocoach”, expert… de sa propre méthode, il répare les histoires des autres en tant que StoryDoctor©. Pas étonnant qu’il soit aussi question de parenthèse hypnotique et d’émotions, d’hormones à activer pour le meilleur… ou pour le pire.

Le risque final, le comble du comble ? Que tout le monde ait lu les mêmes mémentos de soft skills et se livre une bataille en règle à coup de recettes infaillibles sur la puissance des mots. Et on se dit qu’il est bon, aussi, de percer la discrétion pour aller chercher une personnalité qui se mérite, loin des standards, pour le seul plaisir de la conversation.

• Franck Marcheix. Comment devenir intéressant, Diateino. 19,90 euros.

Et chez le même éditeur, au chapitre Éloquence de la catégorie Développement pro-perso, bien d’autres déclinaisons : Pitcher comme un pro, La mécanique du discours, Parler moins pour en dire plus…