Au fil des rues de Périgueux, durant des décennies, Martine Balout a entraîné des flots de visiteurs curieux de découvrir l’histoire de la ville. Elle la raconte à travers une foule de détails, de personnages et d’anecdotes, parfois costumée et toujours avec passion. À partir de lieux ou d’événements, elle entraine ses auditeurs derrière ses talons, dans un tourbillon temporel, sans oublier d’agrémenter ses récits d’expériences personnelles. Son public en redemande. Depuis quelques années, elle est invitée dans les pages du journal La Dordogne Libre pour des chroniques périodiques qui se retrouvent par la suite rassemblées en petits livres. Le dernier, qui vient de sortir, a un titre qui résonne comme les fameux récits de Pierre Bellemare : “Nouvelles histoires incroyables mais vraies à Périgueux” (Éditions La Geste, 20 euros).
De 1977 à 2022, elle fut salariée de l’Office de tourisme puis du service d’Art et d’Histoire municipal, avant de continuer à son compte avec sa micro-entreprise Historia’Cité.
Née dans la petite rue Mignot dans le vieux quartier du Puy Saint-Front où fut tourné l’emblématique feuilleton “Jacquou le croquant”, fille d’un cheminot et d’une bibliothécaire, elle baigne depuis toujours dans le patrimoine local et ses histoires. Diplômée en langues étrangères appliquées (anglais, italien et allemand), elle a suivi des études de tourisme, pratiqué un peu d’archéologie en Italie avant d’être reçue à l’examen de guide conférencière. Jean-Louis Galet, président de l’Office de tourisme, la remarque dans les années 70, apprécie son travail de terrain et la fait vite travailler. Sa première mission fut l’animation d’un colloque sur Léon Bloy, l’écrivain et polémiste exalté né à Périgueux.
Un goût pour l’insolite

Martine Balout, adore faire découvrir les détails cachés, les recoins, les monuments disparus, les personnages oubliés… Elle partage ce goût pour l’insolite avec ses visiteurs, pour qui elle sait trouver des archives et surtout faire ouvrir des portes de lieux inédits. Son dernier recueil d’histoire est dans cette veine. Elle nous raconte comment la tour Mataguerre, ultime vestige des fortifications médiévales de Périgueux, a échappé à la démolition voulue par la ville en 1876. La toute nouvelle Société historique et archéologique avait mis en avant le poids des notables qui la constituaient pour faire stopper ce projet. La tour sauvée est aujourd’hui un incontournable point de vue sur la vieille ville et le départ naturel des balades patrimoniales.
On l’a dit, la guide se livre beaucoup dans ses histoires du patrimoine local. Par son père Robert Saint Just, cheminot, et sa grand-mère, garde-barrière à Gardonne, elle est très sensible à la culture ferroviaire. Ce qui vaut un article sur le Copo, club olympique qui émane de la société du Paris-Orléans qui gérait les ateliers de réparation. Il avait son stade et sa piscine (aujourd’hui démolie) où la jeune Martine a appris à nager dans sa jeunesse.
La chapelle détruite de l’hôpital

Elle raconte aussi les secrets de l’hôpital construit dans les années 50 sur une colline dominant Périgueux par l’entreprise Balout, de son beau-père, « qui avait commencé à travailler en poussant des brouettes ». Son beffroi avec horloge de 32,17 mètres de haut, voisine un bâtiment aux airs de paquebot qui fut avant-gardiste. Il était à l’origine flanqué d’une chapelle contemporaine dédiée à Notre-Dame de toutes grâces, qui a été détruite lors de l’extension du centre hospitalier dans les années 2000.

La chroniqueuse remet en lumière un petit stade route d’Atur, créé en 1943 pour la police de Vichy, les GMR, groupes mobiles de réserve, remplacés par les CRS, après la guerre. Ce lieu décoré de fresques de Julien Saraben, exaltait les corps à la manière antique. Elles ont aujourd’hui disparu et les quelques vestiges sont cachés par un lotissement HLM et enfouis dans la végétation. Il est aussi question de végétation avec l’histoire du jardin des Arènes qui surplombe les vestiges de l’amphithéâtre gallo-romain qui pouvait accueillir jusqu’à 18 000 spectateurs. Il fut un temps géré par la société d’horticulture.

Elle raconte aussi l’histoire des cinémas dans la ville depuis les premières projections envoyées des frères Lumière, la vie du photographe Eugène Dorsène de la Belle époque qui fut par la suite un pionnier des rayons X pour aider l’hôpital de la ville, le domaine de Sallegourde où se trouve aujourd’hui le golf et celui de Castel-Peyssard derrière la préfecture. Elle n’oublie pas de remonter aux origines de la Dordogne libre qui accueille ses chroniques. Elle foisonne d’idées pour continuer à raconter sa ville de l’Antiquité au XXIe siècle. C’est ce qui la fait courir tous les jours en jonglant avec ses activités de grand-mère très occupée.
Visites mensuelles
Depuis trois ans, Historia’Cité organise de visites à la demande, mais propose chaque mois un coup de projecteur sur un coin de ville. En 2025, après la bourse du travail, le secteur de Sainte-Claire où se trouvaient les abattoirs, Combe des dames et son aqueduc disparu, Saint-Martin et le temple protestant tout proche, les anciens bains douches, le samedi 14 juin, ce sera le quartier des Mondoux, qui jouxte Barnabé.
Comme à chaque fois, la visite débute à 14 h 30, coûte 10 euros, et s’achève autour d’un verre dans un lieu inattendu. Martine Balout essaie de ne pas dépasser 40 personnes . Réservations obligatoires au 06 75 87 02 48.
Elle dédicacera son dernier livre à la librairie Les Ruelles place de l’Ancien-Hôtel-de-Ville, samedi 28 juin de 10 h 30 à 13 heures.