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Hommage à Gérard Fayolle, un amoureux du Périgord

Gérard Fayolle Bugue
Gérard Fayolle, chez lui, au Bugue © HC
ADIOU. Historien, homme de Lettres et attaché à l’occitan bien avant d’être un politique, l’ancien sénateur maire du Bugue auteur d’une quinzaine de livres était reconnu pour ses valeurs humaines.

Il avait fait sienne l’une des devises de Montaigne d’attachement à son pays d’origine : « j’aimerais mieux, à l’aventure, être deuxième ou troisième à Périgueux que premier à Paris ». Né au Bugue en 1937, Gérard Fayolle était viscéralement attaché au Périgord en général et encore davantage à ses rives de la Vézère. Passé par l’École normale de Périgueux, il était devenu professeur d’Histoire au lycée Laure Gatet de Périgueux, avant de partir travailler dans des services ministériels à Paris, notamment pour développer la Francophonie.

Mais il n’avait toujours qu’une envie, celle de revenir le plus souvent possible dans sa chère cité buguoise dont il fut à la fois conseiller général et maire durant 25 ans. Même lorsqu’il se retrouva sénateur durant presque deux ans en remplacement d’Yves Guéna (de 1997 à 1998), il était le plus souvent possible sur le terrain au contact de son Périgord.

Catherine Rebeyrotte, qui a écrit sa biographie (Éditions IFIE, 2016), en parle avec émotion  : « Ce passionné savait également faire preuve de fidélité en amitié, certains d’entre nous peuvent en témoigner ». Cet homme public était discret et « laissait entrevoir toujours avec parcimonie ses passions plus secrètes ». Elle révèle qu’il adorait le football anglais et lisait James Bond dans le texte. Au Bugue, il a beaucoup œuvré pour la commune qui lui a rendu hommage en baptisant de son nom sa nouvelle médiathèque, à laquelle il a légué son importante collection de livres.

« Sa gentillesse et sa bienveillance »

Gérard Fayolle en 1992 devenu durant deux ans président du Département
Gérard Fayolle en 1992 devenu durant deux ans président du Département. © Collection particulière

Il a laissé sa trace au Conseil régional d’Aquitaine où il avait défendu l’occitan en intervenant dans cette langue en pleine séance. À Bordeaux, il s’est longtemps occupé du Centre régional des Lettres, notamment pour défendre les éditeurs locaux au nom de leur importance pour le territoire. Comme outil en Dordogne, il avait créé en 1999 l’institut Eugène Le Roy, « vitrine élégante de l’esprit périgordin » écrivait Jean-Michel Linfort, qui lui avait succédé à la présidence au bout de dix ans.

L’historienne périgourdine Anne-Marie Cocula-Vaillières l’a très souvent côtoyé sur des ouvrages communs comme les révoltes paysannes, avec l’exemple qui lui tenait à cœur de Jacquou le Croquant, d’Eugène Le Roy. À la Région, ils se retrouvaient sur la politique du Livre. « J’admirais sa gentillesse, sa bienveillance, son écoute, sa façon d’être conciliant, même en n’étant pas du même bord politique. Il adorait l’histoire et son coin de la Vézère. Il a été malheureux à la fin de sa vie lorsqu’il a dû déménager avec son épouse pour des raisons de santé. »

Gérard Fayolle a beaucoup marqué la Shap, la société historique et archéologique du Périgord, qu’il a présidée de 2007 à 2018. Son actuel président Dominique Audrerie parle du « souvenir de sa délicatesse et de son grand savoir qu’il savait faire partager sans jamais se mettre en avant ».

Le Bugue, centre du monde

Son ami, l’écrivain Michel Testut, l’avait baptisé un jour dans la préface d’un livre sur la Dordogne, du titre de “Périgordin absolu”. Il adorait Gérard Fayolle avec « son humour très fin qui pouvait être redoutable, ainsi que son autodérision » son écriture, son côté « artiste rêveur davantage qu’homme politique », sa belle écriture et sa défense de la France rurale. Il a posté un beau message d’hommage dans ce sens sur le site de l’Académie du Périgord qu’il préside.

«Nous avons passé des moments délicieux, comme ce passage un jour sur le marché du Bugue en sa compagnie où tout le monde venait le saluer. On voyait qu’il aimait les gens ».

De passage à l'Académie française, avec Xavier Darcos
De passage à l’Académie française, avec Xavier Darcos © DR

L’ancien sous-préfet et peintre Jean-Michel Linfort, dans un ouvrage collectif sur les Figures du Périgord (Editions IFIE, 2017) parle de son éternelle défense de la ruralité et du monde paysan. Il évoque un « amoureux inlassable du terroir, le portant en lui, à bras-le-corps, et de multiples manières, de l’écriture aux estrades de la République. Il est devenu l’historien patenté en son territoire de la civilisation des champs ».

Dans le même ouvrage, Gérard Fayolle évoque dans quelques pages alertes, la petite histoire de ses ancêtres paysans recensés depuis 1600 « dans un quadrilatère d’une lieue de côté, sur la frontière des paroisses du Bugue et de Journiac ». Une ferme de ce territoire s’appelant la Fageolle (la hêtraie) serait à l’origine de son nom. Il resitue ces paysans dans la grande histoire du Périgord traversant les guerres de Religion et les révoltes. Il y souligne le rôle de Montaigne et de La Boétie, du chanoine astronome Jean Tarde et du docteur chimiste Jean Rey, originaire de la commune. Il rappelle le dynamisme commercial du Bugue lié aux gabarres sur la Vézère et à son marché fixé le mardi par un arrêté royal de 1319.

En lui laissant le dernier mot, tout ceci lui fait écrire avec malice que ses ancêtres « ont sans doute le sentiment que le Bugue est le centre du monde. C’est d’ailleurs une impression que j’éprouve moi aussi aujourd’hui ».

• Les obsèques de Gérard Fayolle auront lieu mercredi 13 août (le lendemain du marché) à 10 heures à l’église Saint-Sulpice du Bugue. La cérémonie de crémation à Bergerac sera par la suite dans l’intimité.